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Adamantis - The Daemon’s Strain [EP] (15 avril 2022)

Publié le par Stéphane DELURE

 

 

Adamantis est une jeune pousse américaine (Boston pour être précis), qui a commencé à aiguiser son épée en 2016 et sorti son premier EP, Thundermark, en 2018, avec au chant la guerrière Ashley Caval. Changement de line-up et de taille avec l'arrivée du chanteur Jeff Stark, qui illuminera de sa puissance évocatrice l'excellent premier album, Far Flung Realm, sorti en 2020, album consolidé par les piliers que sont les guitaristes Jeff Taft et Javier Estrada, ainsi que le batteur Evgeny Gromovoy (juste de bout en bout, puissant mais sachant mettre le frein quand nécessaire). Cody Pelchat est venu remplacer une autre femme à la basse, Elizabeth Cleary, et le moins que l'on puisse dire est qu'il ne va pas démériter. J'ai parlé d'épée aiguisée ? Oui, et ce n'est pas anodin, car Adamantis donne dans le power metal américain, celui qui se souvient de ses racines heavy (donc européennes) et nous offre des compositions souvent épiques propres à transformer une salle de concert en chant de bataille. Impossible de ne pas penser à Manilla Road, Manowar, Eternal Champion, Wisigoth ou Judicator pour ce côté guerrier, même si le style des bostoniens leur est propre (sans pour autant avoir inventé un genre, et telle n'est d'ailleurs pas leur volonté).

Manque de bol, sortir un album en 2020, c'était se heurter à la barrière du Covid, et aux tournées de promotion ratées. Plutôt qu'attendre que passe l'orage, le quintet a décidé de nous concocter un nouvel EP, histoire de patienter avant le retour sur scène et l'arrivée du prochain opus, activités qui vont remplir le planning de ces guerriers affutés en cet an de grâce 2022. 

Après le très enlevé Far Flung Realm et sa pochette aussi haute en couleurs que les aventures vécues par son héros, nous passons à quelque chose d'un peu plus sombre, qui marque une avancée certaine du groupe. The Daemon's Strain ne contient que 4 titres, mais chacun va avoir son importance et révéler quelque chose du futur du groupe... même si cela revient parfois à jouer avec de l'ancien. L'artwork est toujours aussi guerrier, magnifiquement signé par Wyrmwalk, mais possède une aura plus funeste, presque tragique, avec ce clair-obscur annonçant des péripéties dignes d'Ulysse et de son long et douloureux retour vers les rivages d'Ithaque.  

On commence avec un morceau non retenu sur le précédent album et qui se voit totalement retravaillé, avec des riffs repensés par Jeff Taft, jusqu'à ces paroles inspirées par un soir d'orage, le tout offrant un hymne immédiat, Storm The Walls, fort en chœurs que reprendra sans peine la scène (cf. le clip ci-dessous, animant une taverne où s'avale la cervoise par pintes entières). Une fois le morceau entamé, nous sommes sur un navire empli de guerriers, proches du rivage ennemi mais secoués par de violentes vagues, des torrents de pluie, et quelques moments de calme avant que n'arrive la vague suivante, énorme. La basse tisse la menace au détour d'un bref répit, puis les riffs arrivent, la voix du chanteur, excellente,  nous amène du sommet de la vague jusqu'au rivage trempé où la bataille va commencer, le tout servi par un solo épique fort inspiré. Du bel ouvrage qui ravira les amateurs du genre, avec une production claire qui ne sacrifie cependant pas à trop de modernité et garde un petit côté vintage fort agréable. Et déjà l'on sent ici ou là quelques relents folks, celtiques, et l'on se met à penser aux suédois de Falconer.

Dark Moon Goddess, tout nouveau morceau, ralentit le tempo, se partageant entre acoustique et électrique, hymne sombre, parfois proche du doom, sur lequel brille la voix de Jeff Stark, montant très haut (il est réellement impressionnant), ainsi qu'un solo légèrement oriental du plus bel effet tandis que vrombit en arrière plan la basse, omniprésente. Superbe.

Arrive ensuite le morceau le plus ancien du groupe, qui donnait son nom au premier EP du groupe, Thundermark. Titre réenregistré afin de montrer la nouvelle approche de Jeff, car n'oublions pas que ce titre avait d'abord été pensé pour une voix féminine, même si celle-ci était déjà puissante. On pense à Elise C. Martin et son passage de flambeau réussi au sein de Dark Moor par Alfred Romero, moyen au passage de rappeler qu'Elise avait effectué un joli duo avec Jeff Stark sur le premier album d'Adamantis. Meilleure production, plus de dynamisme, un bon moyen pour les fans de la première heure d'adhérer à la transition et leur donner envie d'aller voir sur scène ce tout nouveau groupe.

Puis tout se termine avec le titre éponyme, qui rappellera quelque chose aux mélomanes les plus ouverts. Car oui, The Daemon's Strain est une reprise, celle d'une ballade d’origine écossaise, régulièrement réinterprétée dans tout le monde anglo-saxon, sous divers titres (The Daemon Lover, James Harris, James Herries, The House Carpenter). Ses plus illustres interprètes ont pour nom Doc Watson, Joan Bez, Bob Dylan, pas vraiment des manchots donc. C'est cette reprise qui aura demandé le plus d'efforts au groupe, et c'est bien normal quand il s'agit d'injecter du metal et de l'épique à une chanson à l'origine marquée par son romantisme noir. Le travail effectué est indéniablement à la hauteur des attentes, la symbiose étant parfaite entre le duo formé par Jeff Stark et Krista Sion, venue tout droit de Dialith. On marche dans la brume, au bord de l'océan, baignant dans cette aura de mystère et de conte un peu triste voyant un charpentier ayant coulé avec son enfant à bord de son navire, laissant sa belle esseulée sur le rivage. Le côté épique n'est jamais laissé de côté, sans pour autant saper la beauté de cette chanson, et c'est ainsi que l'on se prend à penser à d'autres groupes bien plus agressifs, lorsqu'ils versent dans le folk celtique et la voix claire, et je pense notamment à Ensiferum et Suidakra. Après l'hymne Storm The Walls, assurément l'autre temps fort du disque.

Le tout n'aura duré que 29 mn, mais la surprise est de taille, offrant l'opportunité de ne pas oublier le bel effort qu'était Far Flung Realm avant que ne passe le temps et donnant à voir une nouvelle facette de ce jeune groupe très prometteur. A l'heure où beaucoup n'ont pas su quoi faire de leur confinement, je ne peux que saluer ce bel effort, même s'il donne évidemment envie d'en entendre plus. Pour ceux qui auront raté la discographie du groupe, retour en arrière obligatoire !

 

Note : 08/10

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