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Jack Machillot - Chaos Ex Machina (22 avril 2020)

Publié le par Stéphane DELURE

 

Deuxième pastiche lovecraftien publié aux éditions Ogmios, après Le Voyageur Onirique, de Guillaume Beck, chroniqué d'ailleurs en ces lignes. Après l'onirisme sombre du Voyageur (ouvrage qui sera cité par l'auteur en clin d'œil, au détour des rayons d'une bibliothèque aux côtés de livres maudits plus classiques), changement radical de style pour ce nouveau court roman ou novella (120 pages), qui nous plonge dans un futur lointain et cyberpunk, aux côtés d'un détective à l'ancienne, l'un des rares à ne pas être équipé d'implants et à ne pas être ainsi augmenté. Une relique assez louche, croisement d'un Philip Marlowe ripou et d'un Rick Deckard bien connu des amateurs de SF. Les références à Blade Runner sont d'ailleurs assez marquées, avec cette ambiance dystopique, mais aussi l'apparition de noms sonnant comme des néons dans les bas fonds d'une cité tentaculaire ayant la taille d'une nation : Tyrell bien sûr, et un paquet d'autres que je vous laisse retrouver, et j'ose y intégrer Rutger, prénom de l'acteur ayant sublimé le rôle du plus célèbre réplicant après Deckard.

Chaos Ex Machina se lit d'une traite, fort d'une écriture alerte, maîtrisée, qui passionne et interroge par sa brièveté et sa foule de détails. Le fils d'un ponte disparaît, il aurait trempé dans des affaires louches, et il va falloir fouiller dans un quartier où seuls vivent les non augmentés, et quand l'auteur dit quartier, cela s'entend à l'image d'une ville s'étalant sur des millions de kilomètres carrés. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin, à moins que l'on possède l'esprit d'un véritable enquêteur, ce qu'est indubitablement cette fripouille de Simmons, détective trainant des casseroles probablement à peine moins sordides que la ville elle-même.

Le lecteur est happé par l'intrigue, entrant dans chaque taxi volant, pénétrant plaque en main dans une boutique de cyber-holo-tatouage, donnant avec lui de raides coups de pieds aux clodos qui traînent sur le sol. Le langage est comme l'enquête, impitoyable, explosant au travers de dialogues secs et immersifs. 

On a parlé de pastiche lovecraftien, et c'est ici de la pure SF. Y aurait-il tromperie ? Non, rassurez-vous. Il vous faudra un rebondissement inattendu sacrément bien fichu (il est retors ce Jack !), l'approche d'un établissement psychiatrique douteux ainsi qu'une organisation gouvernementale spécialisée dans l'occulte pour que tout bascule dans la menace venue d'ailleurs. Le final est fou, y retentissent les échos de sinistres flûtes, et je me résigne à ne pas vous en dire au risque de révéler les surprises qui vous attendent dans ce petit livre bourré de surprises.

L'auteur est marseillais, a beaucoup voyagé et n'a donc pas peur de l'exagération. Il maîtrise son écriture et son sujet, livrant un produit délesté des poncifs du pastiche car Jack Machillot a l'intelligence de livrer sa propre vision du cosmicisme lovecraftien et de ses effroyables conséquences.

Pour un deuxième roman, Chaos Ex Machina est une sacrée réussite que je ne peux que recommander aussi bien aux amateurs de cyberpunk que de pastiche lovecraftien.

Ogmios Chaos Ex Machina

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