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Human Remains - Hell (2011, enfin presque !)

Publié le par Mordhogor

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Attention, car voilà selon moi la sortie metal la plus importante de l'année 2011, rien de moins ! Et que quiconque se gausse aille réfléchir en Enfer ! Mon avis vaut tout d'abord pour la qualité intrinsèque de l'objet, mais aussi et surtout, il faut bien l'avouer, pour l'incroyable histoire qui entoure cet album au doux parfum de soufre.

Avec Human Remains, nous jouons avec les paradoxes temporels, un peu comme si l'on entrait dans une certaine De Lorean pour aller écouter ce qui se jouait au début des années 80, dans la perfide Albion, à l'apogée de la NWOBHM (New Wave Of British Heavy Metal pour les incultes, les deux du fond, vous sortez !), mouvance musicale de la fin des années 70/début des années 80 dont sont issus des groupes aussi célèbres que Judas Priest, Iron Maiden, Saxon, Motorhead et Def Leppard pour ne parler que des plus connus. Le metal nouveau jouait alors plus fort, imposait un chant plus agressif et opposait deux lead guitares dans des duels devenus légendaires.

Le mouvement fut très important et écrasa les dinosaures qu'étaient Led Zeppelin, Deep Purple et Black Sabbath pour imposer de nouveaux noms. Comme tout mouvement, il connut son déclin et des années 80 ne survécurent que quelques groupes qui aujourd'hui sont devenus de véritables dieux indétrônables (cf les noms cités plus haut !). Nombre de combos encore dans le circuit de nos jours s'essouflèrent devant les nouveaux standards (ah, le glam, la FM !), les changements de line-up et autres morts suspectes. Ils sortent des albums dans une relative indifférence.

Et puis il y a Hell, groupe né en 1982, plutôt branché dark heavy metal, qui sort en 2011 son... premier album !

Oh, il y eut bien un EP sorti en 1987, Save Us From Those Who Wants To Save Us, et sorti à 1000 exemplaires, mais que ceux qui le possèdent lèvent le doigt (et m'en refilent un par la même occasion !). Le groupe joua de malchance, bien sûr : mauvais label, line-up chahuté et surtout le décès en 1987 de son chanteur, Dave G. Halliday. L'inévitable split suivit et seul Tony Speakman (basse) continua à vivre sa vie dans l'univers musical. Kev Bower (guitare) et Tim Bowler (batterie) trouvèrent un job, se coupèrent probablement les cheveux, se marièrent puis divorcèrent, mettant les crucifix inversés au placard.

Mais il y avait comme un parfum d'inachevé, un sentiment d'injustice laissé derrière tout ça, et la machine fut relancée récemment grâce à l'intérêt grandissant pour le metal old school mais surtout grâce à l'appui du producteur et guitariste (et fan !) Andy Sneap (auquel on doit tout de même le récent et monstrueux album d'Accept, Blood of the Nations, qui doit donner des cauchemars à ce brave Udo, les deux derniers Megadeth et un Cradle of Filth de haute volée, Godspeed on the Devil's Thunder). Ce dernier s'empara de la guitare manquante et amena avec lui Martin Walkyier, chanteur de son groupe Sabbat. Ensemble, ils se lancèrent dans le relecture et le dépoussièrage de titres composés entre 1982 et 1987, puisés dans leur back catalogue.

Malheureusement, les essais de Walkyier ne s'avérèrent pas concluants, de l'avis même du principal intéressé, la voix du chanteur de se prêtant pas au style si particulier imposé par Dave G. Halliday. Car voilà peut-être bien l'une des raisons pour lesquelles Hell n'a pas su trouver sa place au sein des groupes phares de la NWOBHM : son dark heavy metal se basait sur un chant relevant plus de l'interprétation théatrale que des performances d'un Bruce Dickinson, d'un Di Anno ou d'un Peter "Biff" Byford. Ce chant qui relevait de la possession démoniaque n'avait pas conquis le public britannique encore timide face aux performances d'un King Diamond, qui lui, allait devenir un genre à lui tout seul.

Ayant fait un bout d'essai en accompagnement de Walkyier sur l'un des titres, David Bower, frère du guitariste et qui jusqu'ici n'officiait qu'au sein d'un groupe de copains jouant des reprises hard-rock, Crazy Diamond, s'essaya au concept. Et là, à la grande surprise de tout le monde, il s'avéra être la pièe manquante au puzzle, son style théatral et sa maîtrise de la scène (il faut le voir dans le clip On Earth As It Is In Heaven !) lui permettant de sublimer et moderniser la performance un peu datée du défunt Halliday (vous pourrez d'ailleurs vous en rendre compte en écoutant les versions originales des démos présentes sur le second disque !).

Alors, la musique dans tout ça ? Eh bien nous avons droit à un réjouissant revival de la NWOBHM, frappant avec la force d'un destroyer moderne. La production est énorme, mettant en avant chaque instrument de même que les cris de dément du sieur Bower. Les envolées de guitares sont rapides et véloces comme sur les meilleures productions du genre, permettant à la voix de se lacher sur un terrain bien préparé. La batterie claque efficacement, sans esbrouffe ni tape à l'oeil.

On Earth As It Is In Heaven est un titre imparable qui envoie de tous les diables et permet d'apprécier un chant auquel nous ne n'étions pas vraiment habitués - et qui pourra en rebuter certains - révélant une envie de jouer qui fait plaisir à entendre. L'ambiance est parfois lourde, menaçante, avec ce refrain effrayant qui est scandé à l'envie jusqu'à ne plus vouloir sortir de votre tête.

Plague and Fyre s'ouvre sur des bruitages inquiétants, révélant des nappes de claviers fantomatiques et finalement discrets. Nous sommes dans un film d'horreur et la guitare nous entraîne plus loin dans le cauchemar jusqu'à ce que la batterie nous écrase et nous pousse entre les harmoniques démoniaques du refrain. Terrible ! L'un de mes titres préférés. Et quel son énorme !

The Oppressors commence avec un riff reconnaissable entre mille, qui donne une furieuse envie de taper du pied avant que le délire du chant possédé ne commence. A noter un beau travail de la basse et de belles montées dans les aigus de la part de David Bower.

Arrive Blasphemy and the Master, qu baigne là encore dans un cauchemat délétère. L'empreinte de King Diamond est bien présente, sans sur la façon de chanter (une véritable possession je vous dis !) que sur les furieuses envolées des guitares. Le titre dépasse les huit minutes et n'aurait pas choqué au sein d'un Abigail ou d'un Conspiracy (King Diamond, vous suivez ?). Un véritable plaisir pour les oreilles et une chanson qui sait varier les rythmes et les tensions (passées 5 mn, on entre dans le choeur d'une église, que notre démoniaque chanteur ne va pas apprécier. Peut-être était-ce trop ambitieux pour l'époque, mais voilà bien un sacré titre, retors à souhait.

Let Battle Commence est un titre beaucoup plus concis, très rapide, qui démarre un peu comme un Maiden de la grande époque. Ce titre aurait pu faire un excellent single à l'époque, pas tout à fait représentatif du reste de l'album, mais qui aurait séduit un plus large public.

Arrive ensuite The Devil's Deadly Weapon, celle que je préfère, la plus longue puisqu'elle dépasse les 10 minutes. Nappes de synthés qui s'ouvrent comme un brouillard épais sur une voix narrée sortie tout droit des enfers. Les guitares rivalisent pour lancer la machine et la voix se lance dans un vertige d'aigus prompts à vriller les tympans, se rehaussant d'accents plus graves là encore très proches de King Diamond (le vocabulaire est très proche de celui du démon danois). Quelques moments de calme bienvenus mettent en valeur de biens beaux accords de guitares et de ravissants sursauts de grosse caisse.

The Quest coupe intelligemment le rythme avec un titre court, certes plus anecdotique, mais qui contient une phrase qui pourrait bien résumer à lui seul la carrière du groupe : "If you truly believe in what you do, your dreams one day will come true".

Arrive ensuite sur un son de cornemuse perdu dans les highlands la terrible Macbeth, avec une intro grognée, qui s'enroule ensuite dans la spirale infernale créée par les guitares et débouche sur le chant, plus théatral que jamais - Shakespeare oblige ! -, débouchant sur une chanson nécessitant cependant plusieurs écoutes avant d'en apprécier toute la saveur.

Save Us From Those Who Wants To Save Us débute étrangement, sur des synthés très typés années 80 et le menaçant solo de Bower. Tout s'accélère ensuite en une impressionnante cavalcade très NWOBHM et un chant beaucoup plus pressé, débité à toute allure en hurlement aigus. Un bon titre heavy plus proche des standards que le public de l'époque aurait pu apprécier. Je pense que là encore le chant a rebuté.

L'album se termine avec une magnifique pièce de 9 mn, No Martyr's Cage, démarrant par de légers claviers mais continuant sur une rythmique très lourde et pesante. Couplets et refrains sont plus possédés que jamais, évoluant au sein de magnifiques accompagnements qui concluent l'album en beauté.

Autant vous dire que j'ai vraiment apprécié l'album et que chaque écoute révèle de nouveaux trèsors (normal au vu de la longueur et de la complexité de certains titres).

Je me prends maintenant à rêver : et si Andy Sneap jetait maintenant son dévolu sur d'autres gloires passées ? Sneap versus Praying Mantis, Sneap versus Angel Witch, Sneap versus Samson, voilà qui aurait de la gueule !

Maintenant, Hell est bien entendu attendu au tournant : à quoi pourront bien ressembler de nouvelles compositions, des titres modernes interprétés à al sauce NWOBHM. Patience, patience, j'ose espérer le meilleur.

Juste une dernière remarque : le magnifique livret aux couleurs de l'Enfer montre notre quintet maquillé façon Cradle of Filth. Oh, je vois que le responsable de ces clichés n'est autre qu'un certain Paul Allender, guitariste et artworkiste d'un certain Cradle ! Je comprends mieux !

 

Bonne écoute !

 

Stéphane DELURE

 

 

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